Descendant d’esclaves de Marie-Galante (Guadeloupe), quatre générations avant lui, Louis Thomas ACHILLE a su faire de cette terrible réalité historique et familiale une force lui permettant de dépasser les nombreuses conséquences qu’elle a encore dans la vie des descendants de ces populations autrefois asservies.
Aussi les enfants et petits-enfants de Louis Thomas ACHILLE ont-ils choisi de commencer par là où tout a débuté pour les esclaves, un port négrier : celui de Nantes.
Nantes, parce que cette ville a été la première des ports négriers français à en finir avec l’occultation de ce passé, à le regarder en face, et plus encore, à en faire mémoire. C’est à Jean-Marc AYRAULT que revient le mérite et l’honneur d’avoir ouvert courageusement cette voie dès son élection à la mairie de la ville en 1989. Cet engagement a trouvé une concrétisation forte lorsque l’exposition Les Anneaux de la Mémoire a investi de 1992 à 1994, au cœur de la ville, le signe identitaire majeur du Château des Ducs de Bretagne.
Produite par la Ville de Nantes en partenariat avec l’association Les Anneaux de la Mémoire, l’exposition s’est ouverte en 1992, l’année du cinquième centenaire de la découverte du Nouveau Monde, et close deux cents ans après la première d’abolition de 1794. Elle demeure un jalon essentiel de la mémoire de la traite et de l’esclavage.
« A Nantes plus qu’ailleurs, après l’abolition de l’esclavage, les ombres de la mauvaise conscience et du cynisme ont recouvert la tragédie de la traite des Noirs de leur manteau de silence. Parmi les malaises souvent décrits, engendrés par ce refoulé nantais, la démarche paradoxale de ceux qui veulent depuis longtemps crever cet abcès n’a pas toujours été comprise. Elle s’est même vue entravée pour des motifs plus ou moins honorables, mais surtout par crainte qu’il n’en résultât une réputation négative pour la ville. Flagellants d’une mémoire coupable ou cerbères des secrets supposés de la cité illustraient le même mal. Les pages de l’histoire liées au trafic négrier restaient étrangement collées : faute de savoir les lire, on ne pouvait les tourner.
A une époque de troubles et d’incertitudes, Les Anneaux de la Mémoire proposent un avenir à ceux qui en veulent un et ne l’imaginent pas limité à un quartier privilégié du village planétaire au milieu d’un océan de misère. L’homme d’occident n’a sans doute plus besoin d’être un loup négrier mais il serait aussi peu glorieux pour lui, et aussi peu responsable de se conduire en montre d’indifférence et d’égoïsme. »
Yvon CHOTARD – Conseiller municipal de Nantes – Président de l’Association « Les Anneaux de la Mémoire » en 1994 (Extrait de la présentation de l’exposition)
Précisions sur l’exposition »Les Anneaux de la Mémoire » : ici
Davantage d’informations sur le 10 mai 2020 à Nantes : ici
Nantes encore, parce que c’est aussi là que Louis Thomas ACHILLE a, selon ses propres termes, « bouclé la boucle » de son parcours humaniste.
En avril 1994, quelques jours avant la fin de sa vie, il est venu honorer la mémoire de ses ancêtres en portant les Negro spirituals, avec sa chorale le Park Glee Club®, dans l’église Notre-Dame-de-Bon-Port et sur les quais d’où sont partis tant de navires, outils d’un effroyable destin pour des dizaines de millions d’Africains.
L.T. ACHILLE à l’exposition « Les Anneaux de la Mémoire » à Nantes fin avril 1994. Il décédera le 11 mai suivant à Lyon 6°
Pour aller plus loin :
Comment les anciennes villes négrières françaises travaillent sur leur passé – par Maxime Tellier (France Culture)
Loire-Atlantique : Nantes face à son passé de port négrier (France 2)
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